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Marie-Caroline, bénévole à la fondation OCH

« J’aime beaucoup la prière de Mère Teresa : ‘Avoir un cœur pour aimer, et des mains pour servir.’ Au sein de la fondation OCH (Office Chrétien des Personnes Handicapées), j’ai souhaité être bénévole, pour accueillir ceux qui sont de passage à Lourdes, mais aussi témoigner et cheminer avec les personnes que je rencontre. Atteinte d’un handicap de naissance, j’aime profondément la vie, et je rends grâce au Seigneur de ce don qu’Il m’a fait. Une grâce qui, dans mon cœur, se double avec une autre merveille : celle de Le connaître.

Sur la croix, Jésus nous a donnés la Vie. Faire confiance au Seigneur, c’est savoir que Jésus porte nos souffrances avec nous. Laissons-nous conduire par Lui en sachant que nous sommes « attendus ». Nous avons tous vocation à engendrer Dieu au monde.

Souffrir pour souffrir n’a pas de sens. Mais quand le fardeau se fait trop lourd, demandons-nous à Dieu de nous aider à voir au-delà ? Si nous l’invitons dans notre cœur, Il pourra nous faire entrer dans son Mystère. Ce qui se vit est de l’ordre de la fécondité. La Croix n’a pas le dernier mot ; c’est l’Amour de Jésus qui est vainqueur. Jour après jour, dans le secret des cœurs, un chemin peut se faire.

Lourdes fait partie des lieux-phares de ma vie. Au pied du Rocher, il faut ‘se laisser dépouiller, pour se laisser revêtir’. Se laisser dépouiller, c’est se savoir pauvre devant Dieu et Marie ; à la Grotte, nous nous présentons tels que nous sommes, avec  notre maladie, notre handicap, ou notre vulnérabilité. Mais, en union avec son Fils, Marie nous prend sous son manteau ; elle pose sur nous un regard qui nous ‘revêt’ de quelque chose de plus grand et qui nous appelle à ‘choisir la vie’.

Invitons Marie au cœur du mystère de la pauvreté. En lui confiant nos prières, nous pouvons nous laisser regarder par elle. Nous pouvons lui laisser nous redonner de la force. Nous avons le droit d’être fatigués d’être faibles, de crier. Il n’est pas dit que l’on doit être fort tous les jours. On peut crier, non pas pour rester dans le cri qui enferme mais pour laisser jaillir la vie.

Au sein de l’OCH, je suis particulièrement touchée par les échanges qui ont lieu avec les jeunes. Je leur fais cadeau de mes mots ; eux me font cadeau de leur présence et de leurs questions. Il nous faut casser les murs que peut dresser le handicap. Les gens ont le droit d’avoir peur de ce qu’ils ne connaissent pas. Nous sommes ensemble pour nous dire les choses, sans les cacher. Nous sommes en vérité.

Cette qualité des relations, je la recherche aussi dans mon environnement professionnel. Professeure d’anglais en région parisienne, j’ai pour mission de faire grandir chacun dans ce qu’il est. Je chemine avec mes élèves, en les amenant à ouvrir leur cœur à la fragilité. La bienveillance que nous nous portons mutuellement passe par un temps d’apprivoisement. Ce n’est pas parce que je suis handicapée, que tout m’est dû, que tout le monde doit me comprendre, et m’accueillir. L’apprivoisement se fait dans les deux sens. Sans cesse, je dois me poser la question : quelle place et quel temps je laisse à l’autre pour accueillir mon handicap ? Bien sûr, le handicap suscite des difficultés, des luttes parfois épuisantes pour les choses de la vie courante. On peut se décourager. Toutefois, quand on ne parle plus des choses matérielles, mais des relations humaines – qu’il s’agisse des rencontres, des amitiés, de la vie professionnelle… – je dois toujours m’interroger : est-ce que j’impose à l’autre de m’accueillir ? Je ne dois pas me servir de mon handicap pour obtenir quelque chose ; tout comme l’autre ne doit pas essayer d’établir une relation de supériorité.

De manière générale, des liens se tissent ; les cœurs s’ouvrent. Si toutefois ce n’est pas le cas, alors je me pose une autre question : mon handicap n’est-il pas trop violent ? Ou la vision du handicap réveille-t-elle quelque chose de douloureux chez mon interlocuteur ? Cela ne m’appartient pas. On touche là au mystère de chacun. Dieu sonde les cœurs. Ouvrons la « case » du langage du cœur.

Cette année, nous vivons le Jubilé de la miséricorde. Cette tendresse de Dieu m’est donnée, à travers les personnes qu’Il a mises sur ma route. Jamais, il ne m’a laissée seule. La miséricorde du Seigneur se manifeste dans son Amour, déposé sur ma fragilité. Une tendresse qui passe par l’autre, au travers d’un geste, d’un regard, d’un mot. Laissons Dieu nous révéler les merveilles que nous portons tous en nous. Laissons-nous façonner par nos rencontres, laissons-nous enrichir parce ce chacun peut apporter et donner.

En témoignant au sein de l’OCH, je sais que je ne suis qu’un « instrument » de Dieu. Je suis appelée à témoigner de quelque chose de plus grand que moi, de la vie que Dieu me donne. Nous sommes tous appelés à être des instruments de Dieu. Chacun a un appel particulier. Quand je témoigne, je n’expose pas ma vie au sens premier, mais je dis les merveilles que Dieu fait dans chaque vie.

J’ai la certitude que Dieu est présent à nos côtés, à chaque moment de nos existences. Au cœur des événements joyeux ou douloureux que j’ai vécus, Il a toujours été là. Seuls les yeux de la foi permettent de voir cela. Il faut apprendre à « se recevoir » de Dieu et non de soi-même.

Je vois la main de Dieu dans les personnes que j’ai pu rencontrer, dans les événements de ma vie, dans les lieux où j’ai pu aller… Des fois, nous ne savons pas où la vie nous mène. Mais quand nous relisons notre vie, nous voyons comment le Seigneur y est à l’œuvre. Tous les jours, il faut faire confiance. Tous les jours, il faut redire cette confiance. Ce n’est pas simple.

A mes yeux, vivre le handicap sans Dieu est tout simplement impossible. Chaque jour, Dieu me met debout, dans mon cœur. Je ne pourrai jamais dire que le handicap est facile, mais je mesure le don du Seigneur, celui de savoir aussi que Jésus vit l’épreuve avec moi. Je n’aime pas le handicap, mais le handicap me permet de vivre de belles choses. Par exemple, celle de la rencontre de Dieu en vérité : le handicap m’a permis de rencontrer le Christ sur la Croix. Un autre fruit du handicap, ce sont ces amitiés très solides que j’ai tissées. Le handicap n’est pas une fin mais un moyen pour faire éclore des trésors dans nos vies.

Au sein de la fondation OCH, je vis dans la joie de la rencontre. Une joie qui s’appuie sur la simplicité et la profondeur de ce qui est partagé. On apprend tout simplement à « être ». A Lourdes, Dieu a choisi Bernadette dans sa pauvreté. Dieu nous choisit, chacun de nous… Il vient habiter notre vulnérabilité, et Il nous appelle à devenir ses enfants. Pour finir, je voudrais citer saint Paul, qui nous rappelle qu’on choisit d’aimer tous les jours.

« J’aurais beau parler toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante.  J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien. J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien. L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais. »

 

Propos recueillis par Béatrice Rouquet

 

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