TOUS LES SAINTS
« Vivre sans vivre en saint, c’est vivre en insensé. »
Abbe de RANCE
Notre monde semble plus que jamais sombrer dans la nuit. Le XX0 siècle a été celui des guerres mondiales, des camps d’extermination, des génocides. De Verdun à Auschwitz, des massacres perpétrés en Arménie à ceux perpétrés au Rwanda, sans oublier les millions de morts dus aux régimes communistes, c’est une évidence de dire que, de tous les siècles, le XX e est le plus monstrueux. Aussi sidérant qu’il puisse paraître, le XXe siècle porte le risque de maux encore plus grands : non seulement la possibilité d’une répétition des horreurs passées mais encore la fin des espèces animales et végétales, l’empoisonnement de l’air, la dégradation des océans, la déprédation de la nature. A cause de moyens techniques sans précédent, sous la responsabilité des pires irresponsables.
Devant de tels périls, qui n’ont rien de virtuel, la sainteté est plus que jamais une nécessité. Elle nous enjoint de nous relever, de nommer le mal, de lui faire face, d’endurer sa violence et, avec amour et pour l’amour, d’en triompher. Jamais l’exemple des grandes saintes et des grands saints n’a été plus indispensable qu’en ce début de millénaire. C’est qu’ils n’appartiennent pas au passé, mais a un dépôt immémorial qui engage le futur de la planète. L’alternative est simple: ou la sainteté redeviendra une question d’importance, ou c’en sera fini, et la guerre de taus centre tous cèdera à la défaite générale.
En un sens, Jésus n’a rien dit d’autre. C’est faute d’avoir été en mesure de ressaisir le-plus bouleversant de sa parole que le pire est advenu, et risque d’advenir encore.
Dans I’ Apocalypse de saint Jean, il est écrit qu’il y aura cent-quarante-quatre mille sauvés. Les saints, à ce jour, sont quelque cinquante mille. Autant le premier chiffre est symbolique, autant le second indique deux choses : d’une part une immensité que nul livre ne pourrait traiter à lui tout seul, d’autre part la possibilité que le compte de I’ Apocalypse soit atteint un jour, sachant, si on prend l’exemple de Jeanne d’Arc, qu’il a fallu attendre cinq siècles pour la voir reconnue sainte.
Avec deux saints : Mère Teresa et Jean-Paul 11, tant par leurs propos et leurs gestes, leur intensité à être, ii émanait d’eux l’esprit même de la charité – le charisme en tant que tel. Rien de miraculeux, au sens extraordinaire, simplement l’introduction, au coeur du réel, d’un voltage supérieur, de se laisser toucher par eux, de prier avec eux.
Les saints et saintes portent une joie qui est !’insolence suprême. Comme ils ne doutent pas de Dieu, ils ne doutent pas que toute vie soit digne d’être aimée, ni que le monde soit digne d’être sauve. Cette attitude fait d’eux mieux que des rebelles, des insoumis majeurs, des sentinelles de l’avenir. Ils portent en nous, infiniment, l’espérance du paradis.
Christiane Rancé